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Incipit

Incipit

Bonjour, ma fille. Tu es sur le point de naître au beau milieu de l'été, un jour au temps clair, sans chaleur excessive, sur un air élégant de musique mêlant jazz et swing. Indécise, balançant entre juillet et août, c'est une question d'heures désormais.

Ta maman est prise en charge depuis hier matin (30 juillet 2021) par le Centre Hospitalier du Mans (CHM). Après plusieurs monitorings, ils ont décidé d'initier un déclenchement avec la pose d'un ballonnet. Puis, quelques heures d'attente et de ballon de gym plus tard, on observe une ouverture du col très lente mais bien réelle. Malgré une promenade dans l'enceinte du parc du centre hospitalier, jusqu'à la petite chapelle cachée derrière, les choses prennent leur temps. Les contractions sont relativement régulières mais s'arrêtent après la balade.

On attend comme ça jusqu'à 2 heures du matin, puis je file dans un BnB tout proche loué en dernière minute pour dormir à proximité immédiate (5mn en voiture, au 121 rue Gambetta, au Mans, pour le souvenir).

Ce matin, le col est passé de 2 à 4. Plus tard dans la matinée, vers 11h, la péridurale est posée, puis à 11h30 c'est la rupture de la poche des eaux qui est provoquée. Le travail semble évoluer, mais toujours assez lentement. Heureusement, la péridurale agit plutôt vite et le soulagement est rapidement visible sur le visage de ta maman.

Le monitoring dure toute la journée, maman parvient à somnoler ça et là maintenant que les contractions se passent un peu "en coulisses" de sa conscience. Vers 18 heures, le col est ouvert à 6. Toutefois, à 23 heures aussi, ce qui indique un arrêt du travail. Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, s'il est vrai que la péridurale fait effet sur les contractions, les douleurs se sont déplacées dans la région du dos, là où les pouvoirs de la péridurale n'ont pas d'effet... et la maman souffre beaucoup 😔

(la douleur au dos be like :)

En plus, la crevette est positionnée sur le dos, les yeux vers les étoiles, ce qui n'est pas idéal pour une descente facile. La sage-femme nous recommande l'usage du ballon de gym et d'une position à quatre pattes, de sorte à laisser le plus de place à bébé et favoriser nos chances qu'elle se tourne. Le tout, toujours avec les douleurs dans le dos, ce qui n'aide pas.


La césarienne

Nous avions discuté de cette possibilité, la maman et moi, déjà parce qu'on savait qu'elle pouvait être obligatoire pour des raisons médicales, y compris d'urgence vitale (auquel cas le bébé est sorti en 10mn, 15mn max) après un certain branle-bas de combat. La préférence, à l'origine, allait à l'accouchement dit "naturel" (par voie basse), mais la stagnation du travail est une mauvaise nouvelle : la maman souffre, le bébé se fatigue, et la question de l'énergie est centrale pour la gestion de l'accouchement. Un bébé fatigué avant la grande épreuve risque une détresse fœtale, et une maman épuisée risque de ne pas être en capacité de pousser correctement.

Par ailleurs, une fois le bébé engagé pour une sortie par voie basse, impossible de changer de méthode. Aussi, la maman sentant ses forces décliner, et voyant arriver à grands pas les complications avec le col qui n'évoluait plus, a évoqué l'idée de la césarienne. Le médecin obstétricien est venu peu de temps après. Au départ, son discours ne laissait rien présager de bon : "La douleur n'est pas un critère pour faire sortir un enfant", ce qui est vrai. Il a ensuite complété son propos : "Toutefois, dans votre cas aujourd'hui, avec l'arrêt du travail depuis plusieurs heures et vraisemblablement pour plusieurs heures encore, la fatigue va s'accumuler tant pour le bébé que pour vous. Pour éviter tout risque, et avec votre accord, nous allons faire un accouchement par césarienne." 🙌🏻

On nous briefe rapidement : même sans l'urgence d'un "code rouge", ça ira vite, il y aura du monde. Papa peut assister à l'opération (sans rien voir évidemment) s'il le souhaite (oui), ça dure en général 15/20mn à tout casser, si pas de complication le papa repart avec bébé et une sage-femme dans une salle avec maintien de la température à 37°C (au-dessus d'un petit berceau) pour le test des réflexes et les vérifications de santé, puis un peu de peau-à-peau pendant que l'opération continue pour Maman. Puis, la maman sera transférée en salle de réveil et on pourra la rejoindre quand ce sera bon. Après quoi on reviendra dans la salle chauffée pour habiller la demoiselle et filer ensuite ensemble dans la chambre de maternité.

Papa doit donc enfiler la même blouse que les soignants, avec des sur-chausses et un bonnet en mesh (charlotte) car il s'agit de ne pas apporter de bactéries en salle d'opération. J'ai tout de même la permission (sans réclamer) d'apporter de quoi faire des photos. Mais au final, étant à proximité immédiate du visage de la maman, je préfère rester avec elle et l'accompagner plutôt que de documenter à distance. Je sors rapidement le téléphone pour faire quelques souvenirs malgré tout, mais 30s après c'est rangé pour de bon.

L'équipe est vraiment au top, tout le monde nous met à l'aise, surtout la maman, avec de l'humour, de la légèreté, pour faire diversion pendant que l'acte chirurgical a lieu. On plaisante ensemble sur le suspense : mademoiselle sera t-elle "juilletiste" ou "aoutienne" ? Il est 23h45, la question se pose. Quelques blagues plus tard, il est 23h50 pile lorsqu'on nous félicite : notre petite chérie est arrivée !

Bonjour Zélie ! On entend à peine le son de ta voix, mais on l'entend quand même. Tout va visiblement très bien. Tu es déposée sur la poitrine de Maman, on voit pour la première fois ton visage, encore plus joli que lors des échographies. Tu es superbe, et la césarienne a eu le mérite de t'épargner l'épreuve claustrophobique souvent temporairement déformante pour la tête. La tienne est bien ronde, couverte de cheveux bruns. Brieuc, notre sage-femme échographiste, avait raison !

Il avait aussi raison sur autre chose, on l'apprend bientôt : le poids. Il estimait ton poids de naissance à environ 3,100kg, la balance affiche 3,164kg ! Balaise, le gars.

Dans la foulée, on part sur une petite demi-heure de peau à peau tous les deux, en faisant connaissance. Tu dors contre mon épaule, tu es minuscule, légère, douce, précieuse. Je suis déjà amoureux (depuis longtemps, d'ailleurs).

On rejoint Maman qui s'est retrouvée en salle de réveil, et qui est passé elle-même, telle une guerrière, du brancard d'opération au lit, juste après l'opération (les ravages de la morphine...). Elle y est en observation, pour vérifier que les suites de l'opération se déroulent de façon nominale, avant de pouvoir rentrer en chambre de maternité.

La suite ? Au prochain épisode !